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Kadec - Correspondances

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MessageSujet: Kadec - Correspondances Kadec - Correspondances EmptyLun 23 Avr - 6:29
Le domaine d'Ajuntaal - La Fournaise - Cinq ans après l'Alliance

L’ennui s’installait, malgré les intrigues et l’extravagance du lieu qu’elle occupait. La monotonie du labeur de garde, entamé il y avait quelques années sous l’apparence d’un homme et sous le nom emprunté de Kadec, commençait à lui peser.

Le Chevalier Ajuntaal n’avait pas changé de jour, il était toujours ce même homme autoritaire, envieux, cruel et imbu de lui-même. Et je commençais à le détester, non par son attitude exécrable, mais bien de par cette constance qui le rendait trop prévisible. Ses petits jeux, ses renforts de cruauté, ses élans conquérants eux-mêmes devenaient vieux.

J’avais appris au contact des femmes occupant le lieu. Plus que je ne l’aurais cru. Et c’était elles qui me surprenaient encore parfois. J’avais appris davantage sur les mythes du désert et ses histoires : l’ennui porte à la conversation et ces femmes se mouraient d’évoquer les créatures et les djinns qui devaient hanter les dunes, comme les héros de leurs nations respectives. J’avais appris quelques détails sur un village insulaire de sauvages. Une berceuse du Levant ou se trouvait citée une quantité étonnante de choses que d’autres nations auraient perçues comme illicites. J’avais été témoin de naissances et de morts. J’avais lu ces femmes, qui se présentaient toutes comme un livre ouvert. Mais, un séjour dans une bibliothèque ne peut durer qu’un temps.

Les corps nus dans les oasis des jardins suspendus du harem d’Ajuntaal ne me faisaient que peu d’effet. Je me plaisais à penser parfois à l’état dans lequel mon homonyme de l'Augure pourrait bien se trouver, si subitement il finissait dans mes chausses.

L’idée était une lubie, que j’avais gardée sous le coude pour le jour de ma sortie. Car après tout un sacré chaos s’ensuivait toujours l’entrée d’un prédateur dans un poulailler. Et si je voulais en être témoin, voire même en être l’instigatrice, je savais très bien que le masque de Kadec ensuite ne pourrait plus être arboré comme si de rien n’était.

Au fil de quelques mois, je me rapprochai d’une femme à la peau couleur de miel. Ses yeux ourlés de cils épais avaient la couleur d’un puits sans fonds. On devinait que bien des hommes s’y étaient perdus. Sa taille fine et souple comme le roseau, ses lèvres ourlées, son visage délicat, avaient sans doute également contribué. Des concubines, elle comptait parmi les plus belles et en ce sens, elle comptait parmi les favorites d’Ajuntaal. Elle avait ceci de plus que ses comparses, également, qu’elle était cultivée. Elle était musicienne talentueuse, mais une peintre plus douée encore, qui pouvait croquer sur le vélin chaque détail de ce qui l’entourait, tant et si bien qu’elle semblait, munie de pigments destinés aux teintures et délavés en aquarelles, figer sur papier une vie pour l’y restituer fidèlement.

Plusieurs avaient tenté de jouer pour l’approcher de charme. Familière à ce genre de jeux, mais fondamentalement insensible, j’avais pu trouver par son talent, apprécié mais non pas compris, une porte d’entrée. Nombreux étaient ceux qui vantaient leurs propres qualités pour se faire aimer : je préférais lui vanter les siennes, chose qui arrivait plus rarement. Je l’interrogeais jour après jour sur le détail de ses manœuvres, sa manière de choisir et mélanger ses pigments, la densité de ses lavis, le choix du vélin, fut-il tissu ou papier de roseau.  À travers son art, nous tissâmes des liens. De curieuse je devins élève. D’élève je devins amie. D’amie je devins confidente. Elle m’apprit ce que je devinais déjà. Son envie de quitter le domaine d’Ajuntaal était palpable, bien qu’elle fut la plus favorisée du harem (et enviée pour cela). Je lui jurai, à titre d’amie, que je lui offrirais un jour ce qu’elle espérait. L’évasion.

Cela servait l’une de mes aspirations. Bien que ce fut une autre histoire. Ce serait vers les cours de Salrivage, et du Bouclier successivement que je lui ferais faire voyage.

Mais, pour exaucer la promesse de Kadec, qui de mieux que Kadec en personne?

Ainsi, bien que je n’aie pas choisi le messager si scrupuleusement que pour mes autres correspondants, je fis porter un courrier vers le port ou l’Augure aurait pu faire escale, pourvu qu’il put trouver cette nef.


Citation :

Cher Kadec,

Sachant que mon penchant pour les eaux houleuses égale le vôtre, j’ai une offre qui peut vous intéresser.

Retrouvez-moi donc au trou de cul du monde. Accostez au nord, qui sait quels miasmes peuvent porter les courants septentrionaux dans cette région.

Salrivage vous en remerciera.

______


Elle avait laissé pour toute signature une ligne blanche, comme si elle invitait le marin à compléter le tout, ou lui laissait présager quelque chose qui semblait en suspens. S’il était intrigué, éventuellement, les eaux de la Fournaise et son homonyme sans doute l’attendraient.
Mirage d'Astrée
Mirage d'Astrée


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MessageSujet: Re: Kadec - Correspondances Kadec - Correspondances EmptyJeu 26 Avr - 8:39
Qu'une main joueuse, jouée


La vie à bord de l'augure était des plus tumultueuses, surtout pour Kadec qui avait un franc talent, disons-le ironiquement, pour s'attirer les confidences de tous et chacune. Ses multiples années de piraterie ne l'avaient pas rendu riche mais ne l'avaient pas appauvri non plus. Croisé du commérage, on apprenait à le détester pour son maniement du cancan, blessure fatale pour bien des matelots puisque lorsqu'il en envoyait un à la cabine du capitaine, il en ressortait aussitôt en deux pièces. Certes, le capitaine d'Avennes n'avait pas de patience pour les mauvais ragots, aussi avait-elle tendance à décoller la tête des malins s'y adonnant.

Toutefois et au grand amusement de Kadec, lorsqu'il déviait ne serait-ce qu'un brin habilement sa culpabilité, elle ne lui offrait pas la guillotine. Était-ce un traitement de faveur? Assurément, si bien que le jeune Sane lui-même s'enorgueillissait à sa vigueur bien goutée. En effet, pour les rustres employés et choisit par Atherton le quartier-maître - et sous les consignes très strictes du capitaine - tous sans réserve le trouvaient chétif, voire faible et pour preuve, jamais n'eut-il gagné une simple partie de poigne de fer. Il vociférait comme un diable mais n'agissait pas beaucoup, ce qui le rendait presque inoffensif à leurs yeux. Ce qu'ils conclurent cependant, à voir l'agilité avec laquelle il détalait et funambulait son chemin à travers les cordages, mats et différents niveaux du navire, c'est qu'il possédait une grande endurance et une incontestable adresse.

On savait que le capitaine d'Avennes ne gardait pas de pions inutiles et Kadec Sane avait duement dépassé le stade de chair à canon. Aussi avait-il triché la mort punitive plus de fois qu'un matelot ne pouvait compter.

Si son savoir-faire vicieux lui donnait une certaine immunité auprès de leur bourreau, sa sécurité elle, n'en était pas aussi facilement achetée.

Eh oui, plus d'une cinquantaine d'hommes lui jalousant son statut d'invincible ne le renderait pas invulnérable très longtemps. En d'autres mots, ses nuits étaient courtes et sur un oeil. Dû à cette menace constante, le malandrin ne dormait que très rarement sur l'augure, préférant des endroits différents à chaque nuit. S'il avait survécu jusque-là, ce n'était pas pour cause des services rendus par son inlassable trique, non.

Il avait survécu tant d'année parce qu'il avait peur.

La voilà sa plus agressive maîtresse, celle avec qui il couche sans relâche et à laquelle il abandonne sa liberté. On envie le héros parce qu'il affronte ses adversaires avec la justice derrière et le courage devant: sans peur ni reproches. Or, Kadec n'ayant rien d'un héros savait, cependant, que la survie hors des pages d'une fable bien fabriquée, dépendait davantage du mariage polygame entre la scrupuleuse minutie, la préparation et une cervelle esclave de la sur-analyse. Le couard, contrairement à son homonyme des contes adulé, ressent et connaît la peur, apprenant au mépris de lui-même à l'embrasser. Une fois celle-ci domptée, redirigée et remaniée, elle peut devenir d'une utilité critique.

Elle avait causé plus d'une migraine au monte-en-l'air mais pas autant que celles qu'il a infligé aux autres. Kadec n'était pas le plus robuste ni le plus grand, sa force n'était pas très grande et son endurance avait ses limites. Il lui fallait donc quelque chose dissemblable pour réussir à combattre l'éminent et fâcheux sort que celui du kéta face aux requins sur et sous le navire. Si la peur était l'une de ses lames, la lecture et l'écriture en étaient une seconde.

À sa réputation malfamée de coureur de jupons, il lui était facile de justifier ses allés et venues dans les villes côtières et à la vue des autres, aisé de deviner la nature de ses activités. Aisé certes, mais ne vous méfiez-vous pas lorsque ça semble trop facile?

Vous devriez.

Sa réelle occupation était celle du simple citoyen: parcourant les marchés, buvant les ragots, observant le voisin et les voisins du voisin. La distance qu'il parcourt est la même peu importe la grandeur de la ville: de long en large. Il cerne le bureau de poste puis évalue sa grandeur et selon celle-ci imagine le nombre de messager à l'emploi.

Préparation.

C'est comme ça qu'il traque et trouve - toujours - les routes, horaires et messagers. Ensuite Kadec les inscrit dans des petits carnets qu'il camoufle à des endroits clés, mémorise sans faute chacun d'entre eux puis les détruit systématiquement.

Scrupuleuse minutie.

Il s'installe finalement dans leurs chaussures: note la distance la plus rapide des bureaux de poste versus celui du navire, les endroits de repos, le coût des différents établissements, les ruelles à éviter et à partir du salaire récurant des coursiers établit ses calculs, devinant plus souvent qu'autrement la route d'un messager.

Sur-analyse.

Son flair pour le courrier du navire était tel qu'il fut bien souvent le premier à lire les importances destinées à chacun et il n'y a rien de plus valable au monde, pour un homme, que le contenu de sa correspondance. Ces informations servirent au chantage, à la persuasion, au tort, à l'alliance, la trahison et l'alliance derechef des divers membres de l'équipage lui donnant un avantage si magique qu'il lui était arrivé de profiter d'un nombre incalculable de largesses. Seul au monde, il avait le loisir de ne pas avoir besoin de couvrir ses arrières en cet aspect puisqu'il n'avait lui-même jamais de courrier, jouissant de ce rempart supplémentaire.

Vous pouvez comprendre sa surprise lorsqu'il en trouva une lui étant destiné.

À sa lecture, il eut souvenir d'avoir rencontré une dame dont il s'était bien gaussé a priori puis qui l'avait durement forcé au roulé-boulé formel en un rien de temps. C'était lors d'un de ces périples particulièrement dangereux où ses sens étaient le plus aux aguets et se rappella duement avoir flairé le traquenard chez cette femme jusque dans la fibre de son être.

Sa lettre cryptique offrait la même sensation et si on croyait Kadec calme et sans-souci c'est qu'on n'avait pas encore vogué à travers les tumultes qui dissonent durement sa psyché.

Elle lui demandait aussi de mentir à son capitaine, jamais la grande Servanne d'Avennes allait le laisser galvauder aussi impunément sans le menacer de l'écorcher vif et planifier leur prochaine destination sur l'étendue de son cuir fraîchement dépecé.

Sachant tout cela, il ne considéra même pas une seule seconde répondre à cette missive.

Il sera donc au point de rendez-vous sans faute.

Quoi? Il faut bien s'amuser parfois.
Aidan Dagarsson
Aidan Dagarsson


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MessageSujet: Re: Kadec - Correspondances Kadec - Correspondances EmptyDim 29 Avr - 4:40
Domaine d’Ajuntaal – La Fournaise – Cinq ans après l’Alliance

Il était de cette trempe d’hommes qui aimait être là où on ne l’attendait pas. Mais en ce cas-ci, il était attendu et non-attendu à part égale. Honnêtement, je mesurais les chances qu’il se présente, voulant confronter le piège qu’il présumait, ou ne réponde en rien, craignant que la capitaine d’Arvennes ne veuille plus que de son cuir que pour ses propriétés cartographiques. Et j’avais présumé ces chances égales : il me semblait qu’à mander sa venue pour entreprise risquée et douteuse, je jouais la plus curieuse partie de pile ou face qui soit.

Et, depuis mon passage sur l’Augure, je m’étais prise du goût des jeux de hasard. Ainsi, voir son navire en direction du flanc nord de La Fournaise fut une heureuse surprise. Les eaux étaient houleuses et difficiles, c’est pourquoi la majorité des marins censés évitaient l’enclave du flanc nord de l’île de la Fournaise, ou je l’avais dirigé. Non seulement car je devais être la seule parmi les gardes à surveiller ses eaux capricieuses, toutes estimant la traversée impossible, mais aussi car dans cette première épreuve je pourrais voir mon homonyme à l’œuvre. Je l’avais vu alerte, souple, résilient. Et c’était, j’en suis certaine, des qualités pour lesquelles la capitaine l’appréciait grandement, non seulement pour les raisons que vous savez, mais aussi car cela en faisait un survivant, un être de valeur qu’il était agréable, pour femme de son ethnie, de posséder, de conquérir.

Il lui faudrait se démener un temps avec les eaux pour ne pas se fracasser contre les falaises et les rochers qui pointaient. Il lui semblerait sans doute que pour lui, la Fournaise ouvrait la gueule. Et cela me laissait le temps de descendre du sommet de la forteresse d’Ajuntaal ou j’aimais me percher pour, passant d’escalier en couloir, et de couloir en alcôve, pour aboutir à l’une des portes dérobées de la paroi, se confondant avec le roc et donnant sur un pan de forêt tropicale dense, descendant ensuite par la falaise jusqu’à une petite plage discrète ou il dériverait, en nage, s’il était parvenu à garder son navire entier. Mais, sachant sa fibre combattante face aux revers de toute nature, c’était là un pari que j’étais prête à prendre. Ce n’était donc pas qu’une question de si, mais de quand. Ainsi, avant de sortir, je ramassai un livre traînant sur un coussin, en plus du paquetage que j’avais prévu. Comme ça, s’il accostait bien après que j’en aie fini de descendre la paroi escarpée, j’aurais de quoi tromper l’ennui. Si le hasard était un allié précieux à cette fin, il était des choses que je ne lui laissais pas dans ce même esprit.

J’avais donc du temps.

L’escalier fut franchi sans encombre. Un pied devant l’autre, marche après marche.

Le couloir me fit tomber nez à nez avec une homologue garde. Le Kadec de la forteresse échangea avec elle des banalités pendant qu’un autre Kadec se démenait, en contrebas, sur les eaux difficiles. Je ne laissai rien transparaitre de mon empressement, mais, il me fallut à un certain point la rappeler à son devoir pour que je ne prenne point trop de retard. J’étais un peu marrie : chaque seconde qu’elle m’avait prise devrait être soustraite ailleurs. J’eus juste le temps d’attraper mon paquetage, préparé si cette occasion se présentait, dans mes quartiers.

C’est à l’alcôve qui servait de chambre à Aïda, cette femme que j’avais promis de secourir. Je lui expliquai qu’il lui fallait se tenir prête, que bientôt, on viendrait la délivrer. Je lui soulignai que l’apparence variait, mais que le nom serait le même. Et que d’ici le lendemain, je reviendrais lui offrir son salut. Je la laissai pleine d’espoir et alanguie déjà. Elle savait, ensuite, ce que j’espérais d’elle : se rendre à Salrivage pour dresser un portrait d’une jeune demoiselle, la fille cadette du chevalier Usseyn. Ensuite, la même artiste devrait se rendre vers le Bouclier pour délivrer ce portrait à la famille de Beaurivage. Elle était ensuite invitée à offrir ses services à cette même famille, suite à quoi elle serait libre de tout engagement devers moi. Je profitai pour lui admettre, avec un sourire croqué, que j’étais quelque forme de qarīn. Mon visage changeait, certes, mais non point mon intention ni mon essence.

Puis, le pris la porte dérobée dans la roche, et descendit prudemment le chemin boueux et escarpé, entravé d’obstacles et de racines. Je dissimulai mes effets pour la suite de mon périple dans un bosquet après avoir fait un détour, pour qu’il ne fut à la vue de personne.

Le plus difficile fut de descendre la falaise. Je n’avais pas l’agilité du Kadec en version originale. J’avais par contre la présence d’esprit pour m’être munie d’un cordage, et après l’avoir attaché à un tronc solide, avoir pu descendre de façon plus ou moins sécurisée à défaut d’avoir été la plus leste. J’avais de la chance que mon uniforme de garde ne fut point trop contraignant (ni constitué de plus que de tissu et de cuir) bien qu’un rien trop large pour moi.

Il me fallut attendre un peu pour qu’il atteigne la berge. Et sans doute encore un peu plus pour qu’il vienne à ma rencontre, tout à fait là de corps comme d’esprit. Heureusement, j’avais mon livre.

Je le sondais, alors qu’il approchait. J’étais venue sans armes, mais à le connaître il me présumerait sans doute armée d’une dague cachée. J’avais encore pris un nouveau pari, pour le plaisir du simple risque, pour à nouveau laisser l’ennui derrière.

Je lui expliquai la raison de sa venue. Mon idée était de le laisser plus riche qu’il ne l’était la veille, une perspective qui en général, le séduisait (ainsi que la majorité de ses homologues). Et avant toute chose, je glissai une bourse que j’avais prévue pour lui, en ses mains. Elle contenait de l’or, mais aussi des bijoux et objets précieux d’origines variées, prélevées ici et là parmi les affaires des concubines d’Ajuntaal, de petits trésors qui pourraient lui servir pour gagner les faveurs de beaux et d’une belle. En somme, la cache d’une pie volant non point pour s’enrichir, mais car l’objet était brillant et car l’occasion était trop belle, et faisait le larron.

Il lui fallait pour cela enfiler l’uniforme que je portais (et dans un monde idéal, renoncer à sa fine moustache). Grimper contre la falaise. Suivre un parcours complexe de vignes sur une pente boueuse et escarpée, pour arriver à la paroi de la montagne. Là, à flanc de volcan, il trouverait un mécanisme un peu délicat contre le flanc de pierre. J’évoquais l’étape suivante avec désinvolture, décrivant le dédale qui l’attendrait pour retrouver l’alcôve de celle qu’il devait délivrer, puis conduire jusqu’à Salrivage.

Dès lors, un arbre des possibles s’offrait à mon homonyme. Non que j’aie eu la prétention de façonner la réalité, mais j’aimais pouvoir questionner son essence comme j’aimais en faire douter la nature à ceux qui me faisaient face. L’offre que je faisais semblait irréelle, trop belle pour être vraie peut-être pour qui l’écouterait. Il aurait accès à tout un harem, les voies interdites s’ouvraient à lui en une vaste gamme. Bien des richesses étaient sises au cœur de la falaise, qui n’attendraient que d’être prises malgré l’interdit. Pourtant, il y avait bien un piège, seulement pas là où Kadec l’attendrait sans doute. Tout se jouerait sur les limites morales qu’il s’accorderait, et celles de ses capacités. Kadec avait peur et c’était ce qui l’avait façonné, oui : la question était de savoir, à quel point cette peur qui le guidait limiterait ou épanouirait ses gestes. Il n’en reviendrait qu’à lui de rendre le processus complexe ou plus compliqué. Et au vu du nombre de possibilités, cela prenait des airs de jeux où on lançait en l’air un écu certes, mais où il pouvait retomber n’importe où sur un vaste damier. L’issue de ce jeu, à la vérité, m’intriguait au plus haut point. S’il me fallait attendre le résultat un petit moment, au moins j’avais un livre pour tuer le temps.
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MessageSujet: Re: Kadec - Correspondances Kadec - Correspondances EmptyVen 4 Mai - 13:19
Son atterissage sur l'île laissaient derrière les difficultés dans lesquelles son périple avait débuté. Son humble embarcation s'était vaillament battue contre les rafales ardentes et torrents dilluviens de la Fournaise. Épuisée, nul doute qu'elle dormait paisiblement avec les poissons à l'heure qu'il est. Certes Sane était un audacieux marin mais ça ne l'avait pas rendu bon capitaine. Ce qui l'avait poussé à s'y rendre, à choisir ce traquenard plutôt qu'un autre, était un désir irraisonnable et incommensurable de la revoir.

Était-ce un bégain? Kadec ne le saurait pas, il ressentait et indulgeait systématiquement cette attirance envers toutes celles qui l'avait un jour battu à son propre jeu: celui d'être le plus affuté. Proprement dit, ces mêmes femmes savaient habituellement lui donner les deux stimuli qui colorait le plus son existance: la proximité avec la mort et puis le sexe. Dans quel ordre? C'est la réponse à cette question qui, restée sous couvert à mariner dans l'anticipation, rendait sa saveur sublime.

Inutile de dire qu'il fut déçu de son offre, sa cervelle aux images profanes l'avait duement imaginé s'offrant comme récompense: combien de fois l'avait-il dénudé, s'imaginant balader ses mains houleuses sous sa robe et ne s'interdire aucune avenue.

Une femme déjà liée à un homme circonspect, noble possédant un domaine, des serviteurs, un chevalier rien de moin. Il y avait une irrésistible attraction à saisir l'impossible, à vouloir ce qu'on ne peut pas avoir. Ceux là était d'une fraîcheur inestimable, propre à priori, bien nourri, pas comme celles vacquant dans les bas fond du monde dont la vigueur et la solidité hurlait "faudra faire avec" et ne valait pas celle des femmes ayant accès aux vergers et potagers réflétant en elle, la beauté de leur couleurs.

Nous sommes ce que l'ont mange, dit le dicton.

Bien que Sane commençait à en douter puisqu'il n'était pas encore devenu minette.

Ses songes salaçe se dissolvaient dans le réalisme flagrant: N'étant ni riche ni bien nourrit, sans domaine ni blason, le jeune corsaire ajoutait à cela la lassitude d'être usé jusqu'au coton par le capitaine d'Avennes. Comme tout homme dont la fierté dirigeait son feu, il avait besoin d'être pousser par le vent de la liberté. Indirectement c'est ce qu'elle offrait de par la bourse généreuse qu'elle mettait sciemment entre ses mains. Il ne masqua même pas sa surprise, prenant le raccourcis de la facilité sans conscience de, s'imaginant sa prochaine récompense encore plus grande.

Un moment de faiblesse où l'émotion domine le rationnel et où les erreurs les plus grandes sont commises.

En d'autres mots: elle l'avait séduit.

Avait-elle deviné qu'il se trouvait autant dans le besoin? Non, ce serait pratiquer la divination pour une femme ayant passé ces dernières années ici que d'être au courant du bas fond dans lequel il se trouvait. En effet, ses alliés s'étiraient tout comme ses ressources et depuis la nouvelle cuvée de recrue, sa chance pour ainsi la décrire n'avait jamais été aussi absente. Sans compter que pour soudoyer, il fallait de la monnaie et depuis que l'Augure était stationné au quais de Samar, la morte-saison avait rendu ses membres agités et belliqueux, Servanne était si occupée par sa besogne diplomatique que le galion était gouverné par Atherton et cela n'augurait rien de bon pour Kadec. Pour exemplifier; chacunes de ses planques avaient été dénichées, sa nourriture souillée et l'endroit où il planquait ses livres était toujours remplit de hareng. Sans compter ses pertes, tout ce qui valait de l'or pour lui, ses confrères s'assuraient de l'en détrousser.

Malgré ses succès passés, Kadec en revenait toujours à cette peur récurante: celle d'être son père: gâché, dont les routes du destin meneraient irrévocablement au fond d'un océan ou alors marri et puis renié, celui dont la valeur s'effrite jusqu'à l'oubli. Dans les sombres moments qui peuplait son esprit, il s'auto-mutilait; lacérant son âme de tords et de reproches. Ramenant constamment ce sang défaillant arpentant son corps ficellée d'une fibre faible; celle du couard et du raté. À ainsi commémorer ses tricheries, ses mensonges et ses vices, son estime atteignait toujours l'état d'une fondation en ruine et c'est à ces moments abyssaux - comme celui-ci par exemple - qu'il ressentait la nécessité de faire taire ce désespoir. Quoi de mieux que l'ivresse pour y remédier? Il lui fallait quelques chose de plus fort que l'alcool, cependant:

Il lui fallait une victoire.

On lui savait ce talent énigmatique à se sortir du bourbier sous lequel ses pieds semblaient coller comme une deuxième paire de chaussures.

Toutefois, même cette confiance de fer commençait à se fissurer, à croire qu'à ainsi essuyer les éclaboussures, elle commencait à rouiller.

Curieusement, son sentiment, à ce moment, n'avait rien de tout ceci.

Aujourd'hui, la chance était avec lui, cette chance, celle-là, il la transformerait en victoire. Avec ce plan solide, rien en dehors de son savoir-faire et un retour expéditif qui sera marqué, en revanche, par une longue célébration qui impliquerait peut-être, un - ou plusieurs - verre à sa complice et faire d'une pierre, deux coups?

Son idée était soudée, une fois le marché conclus, Kadec éxécuta le plan à la lettre: revêtit l'uniforme, escalada la falaise, dévora la distance avec une ardeur bien assortie au flanc du volcan puis arriva au passage secret menant aux dédales promises.
À force de réflèxion quant à comment dépenser son trésor, ses songes allégés firent volte-face vers l'inquiétude. Il empoigna donc son paiement et le rangea dans un coffre sur lequel il prononça les mots suivant:

«An Por»

Cette formule servait à sceller magiquement son nouveau gain, rendant impossible l'ouverture sans la clé dont il s'était débarassé précédement. Ce sortilège là était ancré dans sa cervelle, simplement par son usage dont la nécessité rencontrait assurément la fréquence. En effet, il n'aspirait pas à ce que les membres de son équipage le connaisse capable de pratiquer la magie. Mesure de précaution peut-être? Kadec ne le su pas, son intuition repeinte de frayeur était seule reine dans la gouverne de ses secrets. Déjà que le quartier-maître avait su renifler ses réactifs sur lui, l'autre jour. Encore une chance que le filou eu la présence d'esprit de bluffer, d'en appeller à une commission destinée au maître-cannonier: en effet, le réactif étant du souffre, il s'agit aussi d'une composante clé dans la fabrication de la poudre noire.

Depuis ce temps c'était devenu une seconde nature que d'avoir toujours sur soi un contenant vérouillable.

Il brava donc les dites dédales avec la légereté à l'esprit et la confiance du gagnant. Arrivé pour ainsi dire dans la forteresse, il pris un temps pour visiter l'endroit. Sous le couvert de son déguisement, le Levantais pu observer les quelques accès, entrées, sorties et autres points d'intérêts.

Sans surprise et comme le ferait la baguette cherchant la source, il trouva le harem avec une aisance magique et ne pu empêcher son excitation de vibrer.

Dans ces vastes jardins au travers desquels il pénétrait, son attention ne connu de répis alors qu'il se perdit à la vu des innombrables jardins qu'il brûlait déjà de pénétrer. Des jeunes femmes à pertes de vues, vêtues d'ornements, de bijoux et rien d'autres. Et que dire de cette poudre aux yeux qui pèse lourd dans leur balance, menaçant celle dans ses chausses dont les tumultes tuméfiait douloureusement sa cotte de maille. Toutes idées de labeur, de gain, de sortie de bourbier partirent en fumé sous le charme de ces déesses pour qui le regard ne maquillait en rien la confession du vice qui s'ensuivrait.

Attiré par les sirènes, il fut bientôt les deux pieds dans l'eau avec entre les mains, les hanches de bronze d'une jolie tatouée aux cheveux parfumés. Long, de jais et ourlé à sa poitrine comme si deux poignes sombres s'occupait déjà de pétrir ses seins. Son regard coloré par le néant offrait le sanctuaire d'une ombre rafraîchissante contre le soleil ardent que promettaient ses lèvres déjà dénouées.

Sa joie, néanmoins, fut écourté par les froides griffes de fer aux reproches criardes des gardiens de l'oasis. Ils tirèrent le malandrin avec une telle force que Kadec sentit presque le ressentiment et l'envie creuser sa peau cuirassée. Sitôt sur la terre ferme, les gardes agenouillèrent l'imprudent puis lui collèrent une rude correction. Dans celle-ci fut infusée une colère satisfaite qui stylait au Sane l'interdiction - maintenant évidente - de mettre la main sur une des concubines d'Ajuntaal.

La belle était là, ignorant totalement le sort du Levantais qui hoquetait sous un coup de pied bien fourré à son estomac. Les autres sirènes se tinrent là où elles étaient, plongées dans un silence de mort comme si chacunes d'entres-elles s'absoudaient déjà du sort du fautif tout en sachant tout bonnement ce qui l'attendait.

Ajuntaal était cruel et envieux et sa justesse avait ainsi façonné ses gardes et ses maîtresses se gardant lui-même le velours d'être démarqué par sa fausse clémence: si le moindre individu touchait ne serait-ce qu'un cheveux à ses concubines il passerait la journée enchaîné au piloris, nu comme un ver, à affronter le soleil ardent de la fournaise.

Propre à celui dont les jeux cruels amuse, la punition avait quelques chose de plus, caché, non-dit, comme s'il voulait que l'un d'eux se fasse prendre.

En prime, le fautif était brutalement castré.

Ce n'était pas une mise à mort pour ainsi emprunter ses mots mais bien une protection contre la rechute. En outre, la blessure vicieuse suffisait pratiquement toujours à vider le malheureux de son sang.
C'était dans sa cellule humide et suffocante qu'un gardien particulièrement bavard l'avait ainsi informé du sort qui l'attendait
Kadec Sane se tenait maintenant deux étages plus bas du domaine d'Ajuntaal, proportionnel pensa t-il, à la profondeur du bourbier dans lequel il s'était empêtré cette fois.

L'ivresse tarit, il ne restait maintenant plus que les lourdes conséquences s'amoncellant devant lui, dans le miroir de sa pensée. Ses mains massèrent ses tempes, comme si la matraque de ses reproches causaient de réel dommage à son crâne. Pourquoi avait-il accepté cette mission? Ce n'était rien d'autre qu'un suicide que sa propre intuition avait lourdement critiqué. Et pour qui? pour elle? qui était-elle donc sinon un lointain fantasme inassouvie qui n'avait, soyons franc, pas besoin de l'être. Noyé dans la promesse d'un or qui servirait quelle cause et à qui s'il périssait aussi bêtement? La pensée infectieuse se reporta sur lui-même, si ce n'était pas pour elle, alors c'était pour lui? pour sa propre dépendance aux jeux dangereux, pour ses réserves d'attention qui ne donnait d'yeux que pour les sensations fortes, que pour l'ivresse du triomphe? Et cette ivresse, cette privation des sens qui ne servait qu'à échapper temporairement à un mal plus grand. Et ce mal, quel était-il? à qui voulu t-il échapper? à quoi? À lui-même? à cet égoisme maintenant dénudé, jugé coupable de ses racines gangrenées?

Étalé comme il allait l'être, s'imaginant entrain de se faire gourmender l'entre-jambes non pas que pour sa chair mais aussi pour son sang, d'un bec qui ne proviendrait pas d'elle mais de charognards, qui semblèrent maintenant être seul détenteur d'une réelle victoire.

Toujours en ses songes, ceux-ci prirent la forme d'une voix familière mais inconnue, comme si cette folie momentanée avait un nom, une forme, une conscience mais seulement dans la prison lugubre de sa tête.

Tu n'aurais jamais dû accepter. C'était du suicide. Cette femme s'en fiche que tu réussises ou non, elle n'est qu'une vile engeance du vice, du chaos, du néant. Tu est faible voilà pourquoi tu as été aveugle, que tu ne l'a pas sentit, que tu as cedé. Tu n'as rien d'un grand homme, tu est plus battu et vaincu que ta mère et plus petit que ton père ne l'a jamais été. Sans le capitaine d'Avennes, tu n'est qu'un pion écervellé, un vaurien annoblit, un vent qui passe; momentanément ressentit mais toujours invisible.
De ta valeur ou de ta vie; laquelle crois-tu aura été la plus courte?

La déshydratation couplée à l'affollement commencèrent à puiser dans ses réserves déjà grandement dépensées. Dans ses souvenirs, jamais il n'eut douté ainsi de lui-même, c'était comme si une voix, un être d'une nature aussi lugubre qu'inconnue s'était emparé de sa psychée. Puis la lucidité lui revint: les monstres d'une telle sorte, ça n'existaient pas.

Rien de tout ça ne l'aiderait à sortir d'ici. Alors, comme par magie, du chaos naquis l'ordre: la réponse à sa question lui paru aussitôt simple et limpide. Il avait accepté ce marché pour l'or, pour les pierres, pour la simple et bonne raison qu'il lui fallait gagner son pain.

Tout ça lui donna une idée.

Le gardien avec lequel il bavardait lui semblait ferme et décisif sans toutefois bien cacher la lueur avide en ses iris, un besoin de contrôle, de rabaisser autrui afin d'assouvir ce même besoin, d'établir la hierarchie entre l'homme et la vermine.
Et c'était précisément à cette légereté ressentie par la satisfaction de sa capture qu'il conversait avec lui, d'homme à vermine, de conquérant à conquit. Kadec avait brodé avec des hommes comme lui toute sa vie; ainsi rien de ce qu'il ne dirait ne changerait l'aspect incrusté dans son idée. Qu'aucunes paroles ni fait ou geste ne trahirait son intelligence, en sommes et pour le gardien; le Sane était un idiot et un incapable.

Alors il l'indulgerait:

«T'sais, dans mes effets, j'ai quelques pierres brilliantes qui valent un joli p'tit magot. Si tu m'sort d'ici, je te les offre.»

«Aaaah bon?» dit-il, avec le sérieux de la blague.

«Dans un coffret faite en bois d'cerisier avec des motifs de navires et d'vent qui souffle. T'sais, dans mes trucs.»

«Et quoi encore, tu vas me promettre de faire de moi un grand homme? Un traquenard désespéré pour ensuite tenter de m'attaquer aussitôt la porte du cachot ouverte?»

Il y pensait.

Pointant ses fourreaux vides et ses vêtements frippés par l'absence d'une armure récemment confisquée, Sane haussa les sourcils et les épaules tout en grimaçant comme pour démontrer là son incapacité à perpétrer une quelqonque prouesse héroïque.

«Tout c'que j'ai b'soin c'est mes réactifs pour l'ouvrir»

«Un sorcier? toi? Pfffah!» s'esclaffa t-il pour ensuite abandonner son prisonnier à sa solitude. Kadec fut patient, il savait la graine du doute semée dans l'esprit du gardien. Quelques dizaine de minutes plus tard, il revint avec le dit coffre en main et un sac dans lequel était ses composantes magiques.

«D'accord, tu veux jouer? jouons alors» On pu lire dans son expression fronçée et à la sècheresse de son ton qu'il avait tenté de l'ouvrir à plusieurs reprises et sans succès. Sans pouvoir demander de l'aide à ses comparses ni d'aucun magiciens sans avoir à partager le gain, sa patience l'avait ramené ici, devant le prestidigitateur.

«Si réellement t'est sorcier, alors une fois tes babioles en main tu vas pouvoir me transformer en tas de cendres non? et quelle assurance j'ai de savoir que ce qui est dans l'coffre c'est pas une arme ou quelques chose du genre?»

«C'simple mon gars, tu peux laisser l'coffre devant la cellule, pas b'soin d'rester ici à r'garder, tu peux bien aller t'mettre contre l'arche d'la porte loin d'ma vue mais pas d'la tienne, donc d'ma portée, mais pas d'ta surveillance, t'vois? J'le dévérouille et j'te r'lance mon sac d'composantes, d'accord? T'perd rien, pis ensuite t'auras qu'à m'délivrer et on s'oublie, ça semble un bon marché?»

Il le regarda comme avec un silence lourd en jugement et ce même gardien prenait évidemment Kadec pour un imbécile.

«D'accord. Voyons si tu dit vrai.»

Le gardien fit donc glisser le coffre hors de la porté du Sane mais à sa vue à lui, suivit d'un lancé subséquent, cette fois, du sac de composantes. Se planquant contre l'arche sans le priver d'une vue complète sur le couloir et des mains de Kadec qui extirpait les composantes nécessaire au sort de dévérouillage.

«Ex Por.... merde!»


Puis il se repris.

«Ex Por»

Le gardien pouffa de rire.

Kadec lança le sac de composantes hors de sa portée comme prévu. Incrédule mais veillant scrupuleusement à ne pas quitter le roublard de l'oeil, le gardien alla s'emparer et du sac et du coffre, l'ouvrant sans plus tarder. Le chatoiement des pierres fut visible à travers ses iris colorées par l'avidité et croqué à son sourire veiné et venimeux. Il ferma le coffre puis tourna ce sourire sans fin vers son prisonnier.

«Tu n'as pas menti, je te l'accorde.» Puis, repu et comptant probablement ses gains déjà dans sa tête, il tourna les talons sans plus attendre.

«Hé ! ta part du marché?»


«J'ai seulement été d'accord sur le fait que c'était un bon marché.»

Le Sane n'en fut pas aigre, cela faisait partie de l'acte, de la scène si prestement jouée. De toute manière, allait-il réellement faire confiance à un mercenaire? Lorsque le métal de son armure ne fut plus audible, un sourire nâquit des lèvres du rogue marin.

«Mais quelle andouille.»

La porte du cachot s'ouvrit aussitôt. En effet, seul un magicien de métier reconnaîtrait ce subterfuge quoiqu'il fut bien simple: la première incantation - qui se devait être une erreur - servit en fait à dévérouiller le coffre et la deuxième fut tout simplement retenu en l'air, fin prêt à ouvrir la porte du cachot aussitôt son géolier disparu.

Le roublard pris donc la fuite à l'opposé de son surveillant. Ce serait un risque que de connaître son déplacement exact à partir de ce moment Kadec avait du flair: un homme avaricieux doutant de tous puisqu'il doute de sa propre nature irait immédiatement cacher son nouveau gain. C'est basé là dessus que Sane fit son pari. Or à sa visite, tout à l'heure, Kadec avait cerné l'aire de repos des gardiens et avait noté qu'il ne se trouvait pas au même endroit que les effets des prisonniers. Il usa alors de plusieurs ruses, écoutant aux portes, portant attentions aux cliquetis et prenant soin de se débarassé de ses chaussures.

Ce moment était crucial à son évasion, n'ayant sur lui qu'un vieux chemisier et une paire de chausses mal assortie: le moindre gardien l'appercevant sévirait ses chances de sorties séance-tenante. Tous ce qu'il devait faire était de se rendre dans l'armurerie et saisir un nouvel équipement puis ensuite parcourir la même distance et récupérer ses effets.

Ce qu'il fit avec providence, remerciant les divins qu'il n'y eut personne en son chemin ni d'alerte sonné après découverte de son absence. Il voulu s'imprégner d'un sortilège dont il se rappellait avait la propriété de le rendre incognito. En feuilletant son livre de sort, une écoeurante odeur de hareng vint lui indiquer les dommages qu'avait causé l'eau saline à ce chapitre particulier. La colère voulu lancer son grimoire mais sa restreinte se contenta plutôt de maudir sa mémoire défaillante. Il était fréquent pour le Sane de mélanger ses sortilèges ou de les oublier, conséquence virulante de surcharger ainsi et constamment sa mémoire d'informations de toutes sortes. Sans compter ses insomnies qui commençaient à peser lourd sur sa capacité à tirer profit de ses méninges.

Sous le couvert de son déguisement, Kadec retrouva un peu de calme et ainsi les rails de sa mission. Son chemin le mena à la chambre en question dont l'alcôve donnait sur un vaste et sublime paysage: nul autre qu'une chambre destinée à l'une des favorites d'Ajuntaal.

Promise; elle fut offerte à son entrée, encore plus belle qu'il ne l'eut imaginer, donnant à la bronze de tout à l'heure, l'air d'une vulgaire gamine. La différence marquée et non la moindre était son port de vêtement. Au moin, cette brute cruel et venimeuse qu'était Ajuntaal avait comprit qu'il n'y avait pas de beauté plus désirée que celle que l'ont s'imagine.

Voilée, sa robe était magnifique dans sa simplicité et sa légerté: épousant chacunes de ses formes dans une exactitude digne du statut qu'elle portait ici au domaine. Son visage lourdement maquillé semblait pourtant allégé par un regard vaporeux, pétillant d'une intelligence que le compliment n'égalait jamais. La douceur qu'évoquait chacun de ses pas gracile lui fit presque oublier la nature de sa mission.

Kadec ne pu s'empêcher d'effectuer une courbette puis de monter à ses lèvres ténues, un sourire lui donnant l'air d'un fripon madré.

«Vous êtes en retard, il y a eu commotion à l'étage du bas, que s'est-il passé? vais-je avoir ce que l'on m'a promis?»

Ses reproches furent attenuées par l'inquiétude qui submergeait sa voix lyrique. Elle avait assurément rêvé à cette évasion à chacunes de ses nuits passées depuis la promesse puisque son regard était vrai et c'était lui, à travers ses artifices de beauté merveilleusement bien assorties, qui lui donnait sa réelle harmonie. Toutefois, malgré l'hypnose consciente inconsciemment pratiquée sur lui, Kadec pourfendit la volupté de son charme et répondit en un éclair:

«Absoluement mad'moiselle, voici l'plan, je couvre votre apparence d'un sortilège qui vous rendra incognito puis j'vous aurai à mon bras comme si j'menais une prisonnière au cachot.»

Mais il ne s'en souvenait pas, vous souvenez-vous?

«In Jux Sanct - Non, c'pas ça, une seconde.... Ort Por Ylem ! Merde d'chien ... hm, peut-être celui là ? Kal Por Ylem.»

Il fut interrompu en voulant tenter un quatrième sort, par la douceur halée de la main d'Aïda. Avec une maîtrise parfaite de la parole, la concubine lui offrit un sourire désarmant couplé d'une pause calculée à la voix légère malgré l'importance que la mission avait pour elle:

«Le sortilège vous reviendra j'en suis certaine, si j'ai bien compris vous êtes un excellent acteur c'est bien ça? Je propose que vous m'escortiez vers notre destination, personne ne vous opposera si je semble être sous votre protection ne croyez-vous pas?»

Aïda était assurément douée en persuasion. ce qui le fit donc lui abandonner les reines vers le passage par lequel il était entré et ainsi sortirait. Que de minuscules obstacles avaient obstrué son chemin se dit-il mais rien n'allait se mettre entre lui et cette victoire lui appartenant.

Les dieux étaient bons aujourd'hui.

Comme ça, on pu croire qu'il venait de se maudir lui-même. Les issues menant au passage secret furent bien campées lorsqu'ils arrivèrent sur les lieux. Un regard rapide comptait quatre gardiens devant et puis deux autres derrière, tous armés jusqu'aux dents avec à leur tête son géolier.

Il arborait un sourire victorieux, d'homme à vermine, ayant laissé cette dernière ramper dans les couloirs sombre du domaine comme une vulgaire punaise qui indifférait trop pour l'écraser. Kadec avait une houleuse impression que toute sa chance jusque là n'avait pas été dû au hasard.

«Je me demandais bien ça te prendrais combien de temps avant de recommencer. T'as pas compris, faut croire, mais alors là tu t'attendais quand même pas à partir avec l'une des favorites de Ser Ajuntaal quand même?»

Le regard d'Aïda passa de Kadec au gardien puis l'inquiétude se changea en choc faussé.

«Que .... que se passe t-il ici, Rheyan?»

Elle fut parfaite, les inflexions de son visage, l'écarquillement de ses yeux, tout, jusqu'à sa peau entièrement crispée alors qu'elle s'était montrée détendue précédement. Sa fine poigne se ressera à son encolure et elle recula de quelques pas vers l'arrière.
Ce langage corporel suffit non seulement à rendre son mensonge crédible mais à proprement manipuler le dénommé Rheyan. S'éxécutant avec une telle finesse qu'elle n'eut besoin d'aucune histoire à inventer: elle lui laissa plutôt le soin de la monter lui-même.

«Douce Aïda, enfant naïve, vous avez été dupée, cet homme est un criminel pour avoir tenter de souiller la pureté des compagnes du Ser Ajuntaal. Il est maintenant à convoiter la vôtre, sa présence à vos côtés, ses paroles enjoleuse ne sont qu'un fiel, un poison, une blessure encore plus grande encore que le fait qu'il ose arborer les couleurs du domaine.»

La main scandalisée de la concernée priva l'audience de ses lèvres évasées. Laissant plutôt paraître ses iris à l'étonnement tangible amalgamé à l'angoisse ficellée, tissant l'illusion de la jolie naïve tout en donnant l'occasion rêvée à ses admirateurs secrets de venir à son secours.

On ne l'avait jamais aussi bien abandonné à une mort certaine de toute sa vie.

«Tuez le!»

C'est avec la colère dévastatrice de la grande représaille que les héros d'Ajuntaal se ruaient, lances pointées, sur l'engeance du malin. Ce roublard, cette canaille, son seul réel sauveteur. C'est à ce moment précis que ses sortilèges lui revint et ses lèvres, ses gestes parlèrent d'eux-même.

«Kal Ort Por»

Puis il disparu.

Plus de domaine d'Ajuntaal, plus de chaleur suffocante propre à la Fournaise mais plutôt la quiétude déstabilisante de sa chambre au deuxième étage d'une auberge miteuse. Ça lui revint du même coup: il eut payé pour celle-ci simplement pour pratiquer ses nouveaux sorts, à l'abri des curieux. Située tout près des quais où l'Augure était visible, ces appartements représenteront la tombe de sa fierté en tant qu'homme.

Abandonnant sa raison au désespoir, Kadec eut devant lui le fait accomplit: Tout ce chemin pour n'être revenu qu'au point de départ.
Il s'en donna alors à coeur joie, plus de restreinte, sa colère fut dévastatrice et rien ne fut épargné; table de nuit, vase décoratif, peinture au mur, armoires. Lorsqu'il fut repu, son coeur battait, ses jointures chauffaient et sa cervelle détalait.
Sa frustration était palpable: non seulement n'avait-il pas pu s'empêcher de se vautrer à grande enjambée dans ce harem maudit mais en plus, il n'a pas été foutu de se rappeller du seul sortilège qui aurait pu lui épargner de payer ce gardien, d'éviter de perdre ainsi le seul bénéfice résultant de cette satané quête.

Saccager sa chambre d'auberge ne fut pas assez; maintenant c'était au tour de son esprit.

«T'as vraiment bien sortie du guêpier cette fois, triple idiot! la seule chose qu'tu pourrais faire pour rendre ça encore pire serait d'rentrer d'dans une seconde fois!»

Puis c'est à ce moment précis que son esprit entreprit un voyage véloce à travers sa mémoire.

L'entrée, le harem, les gardiens, le cachot, les sortilèges bluffés puis manqués ...

Voilà.

Buvant les pages de son grimoires avec la célérité de l'assoiffé, son doigt se figea sur une incantation puis la couleur de son visage lui revint. Sa lucidité resouda sa résolution et dans celle-ci naquit une sérénité tranchante d'où on pu l'entendre murmurer:

«Kal Ort Ylem.»

Marque.

Une simple heure avait suffit à Kadec pour se rêvetir, s'armer, faire le plein de réactifs et surtout, se coiffer avec style.
Tout le monde sait qu'on ne gagne pas sans avoir une superbe coiffure.

Comme prévu, le sortilège de rappel le matérialisa exactement à l'entrée de la chambre d'Aïda. La nuit avait coloré sa somptueuse prison à l'harmonie des lucarnes dorées et c'est sur son lit qu'elle était étendue, faciès contre son édredon. Sans boulverser le silence ambiant, Sane pu l'entendre sangloter avec une légerté qui pesait lourd sur son coeur.

Le Levantais éprouva une certaine empathie pour la talentueuse concubine. Elle-même peinte et peintre, si habile dans l'imitation et la repeinte qu'elle s'avère caricature lorsque authentique. Prisonnière de la cruauté de son maître qui l'encageait pour ses talents et pour son agréable minois tandis qu'elle n'aspirait qu'au souffle du vent dans ses propres voiles.

Ça lui rappellait quelqu'un.

Lorsqu'elle l'aperçu, ses iris miroitantes voulurent refuser sa présence mais l'espoir clairsemée qui chargeait le néant de ses prunelles illumina son regard en entier.

Elle se leva pour ainsi rencontrer son regard à lui.

«Vous êtes revenu ...»

«Une punaise je suis, qu'on n'écrase pas si facilement, milady.»

«Je ne suis pas Lady.»

«Vous ravissez pourtant la beauté de celles de tout fiefs confondus.»

«Je vous ai jetté dans la fosse aux lions.»

«Vous m'en devez une alors.»

Décontenancée par sa nouvelle allure, sa diction parfaite, son charme mystérieux et pourtant, elle qui s'éventait à désouffler les poitrails gonflés qui convoitait sa compagnie, voyait ses défenses sublimée par un vulgaire envoyé.
Sa liberté fut promise par son amie et pourtant cet homme qui osait devant elle semblait en être seul et unique pourvoyeur.
Comment il allait la lui rendre, cette liberté, était une question perpétuellement en suspend mais dans l'ivresse du moment, son éclat invincible renouvellait en elle, un feu qu'elle croyait éteint.

Celui du désir.

«Alors laissez-moi régler cette dette à l'instant, milord.»

Elle coula un somptueux sourire qui accompagna à merveille la douce mélodie de sa voix concupiscente.

Quant à ce titre d'emprunt: il voulu la corriger mais sa répartie fut sitôt tuée par ses lèvres qui goûtait agilement les siennes. Sa veste lui fut confisquée et la robe légère d'Aïda coula au sol sans bruit.

*

Lorsqu'ils sortirent ensemble de la chambre, leur pas feutrés n'effleurèrent aucunes oreilles attentives et à parcourir couloirs et escaliers, aires de repos et jardins, n'agitèrent pas un seul oeil indiscret non plus.

Aucune providence cette fois, qu'un sort d'invisibilité qui leur permit de passer sous le nez des sirènes, des gardiens et même du très circonspect Rheyan à qui Kadec réserva un très élégant doigt d'honneur.

Sans tarder, ils furent bientôt à la vue de l'instigatrice de la mission, son livre et sa patience en main.

«Voilà, marché conclus et ce sans une seule égratignure. Autre chose? Peut-être aurez vous, cette fois, quelques chose qui est davantage à la hauteur de mes talents?»

Face à quoi tout le talent de comédienne d'Aïda ne suffit pas à masquer l'inconfort fissurant son sourire
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Aidan Dagarsson
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MessageSujet: Re: Kadec - Correspondances Kadec - Correspondances EmptySam 5 Mai - 6:14
Je le regardai détaler de par la falaise. Puis j’attendis. Plus longtemps que j’espérais. Un peu de raffut me venait du promontoire. Je déclinais dans ma tête l’ensemble des scénarios qui justifiaient son retour si tardif, si tant est qu’il revenait. Je m’étais donnée jusqu’au petit matin. Il aurait pu, malin qu’il était, sonder les alentours et chercher mes caches, et repartir avec tout bonnement, sans ne rien tenir de sa promesse. Mais, si c’était roué, le défi manquait. Non.

Il aurait pu pénétrer le lieu, et se livrant à la mission, trouver ses repères pour revenir régulièrement. Mais, voilà qu’il avait mis bien trop de temps. Il était improbable qu’il ne se fut pas grillé, à tant tarder, d’une façon ou d’une autre.

Je me disais que si la promesse à la capitaine d’Arvennes pesait lourd sur sa conscience…  il pouvait même y avoir les gardes avec lesquelles il pouvait lier quelque amitié, parodies d’homme mais, sous l’apparat, aussi femmes que celles qui se prélassaient dans cet oasis de concupiscence. Kadec était du genre à chercher à voir sous la surface, littéralement comme métaphoriquement. Ce n’était pas tricher, si c’était des « hommes ». Un scénario qui convenait à cette peau qui lui était propre, car simplement je la lui avais empruntée, et qui pourrait le satisfaire sur la durée, s’il voulait trouver en cet oasis caché quelque port d’attache, et trouver ses reines entre un seul plutôt que de les disséminer comme certains marins le faisaient. Je retournai ce scénario dans mon esprit avec un plaisir pervers : c’est celui que j’imaginais le plus probable car c’était celui qui lui aurait assuré un profit sur la durée, c’était l’essence du cadeau que je lui faisais sur un plateau s’il savait en tirer parti, mais c’était sans compter le Kadec plus désoeuvré que calculé qui débattait son sort là-haut sur la montagne, comme l’antédiluvien sage… la sagesse en moins. Il serait bien damné de n'y avoir pensé.

Il eut aussi été possible que Kadec eut décidé de couper le serpent à sa tête : en allant occire Ajuntaal, il aurait délivré Aîda certes, mais aussi l’ensemble de ses consœurs aussi désoeuvrées qu’elle.

Plus tristement, il était bien possible que Kadec ait été simplement occis, d’une mort toute bête et méchante, après avoir été châtré comme il était coutume de le faire pour les imprudents.


(...)

Pendant les heures d’attente, l’arbre des possibles qui étendait ses branches occupa mon esprit, ainsi que la prise de notes de cette histoire volage qui se tissait à mesure de ma curiosité, et de mon avidité à tresser les destins.

Le livre était vierge, au moment ou Kadec avait quitté la plage au grand galop.

(…)

La coiffure du preux héros n’était guère plus si impeccable qu’il l’avait préparée, alors qu’il m’avait rejoint sur la plage, sa rescapée au bras. Les  élans l’avaient décoiffé, et la sueur, celle de la frayeur mêlée au remugle des passions que je flairais d’ici sur eux deux, collait des mèches à son front. La désinvolture qu’il afficha ne me trompait pas, trop factice de par ce qui se lisait sur leurs traits à eux deux.



-J’apprécie beaucoup ce service que vous m’avez rendu, Kadec. Il faudra d’ailleurs que vous me racontiez vos exploits. Nous ferons cela vers ce petit chemin le long de la falaise, qui nous mènera vers une berge plus hospitalière, ou les navires tendent généralement à accoster. Moins à l’abri des regards, mais ou nous pourrons regagner le continent.


Je les sondai, tous les deux. Si Kadec m’abandonnait à Aîda, qui sait ce qu’elle pourrait dire. Elle l’avait trahi une fois, rien n’empêcherait, si elle tirait bénéfice, de le refaire. S’il voulait garder intact le fil de son histoire, il avait intérêt à nous accompagner, et façonner le récit à son bon gré.

(…)

Une fois arrivé près des quais, je m’enquis de la forme du capitaine, une question que le Kadec connaissait en long, en large et en travers, et pour laquelle Aîda n’entendrait rien de plus qu’une banale bribe de conversation.

Avant de nous séparer… Car Aida et moi nous destinions à destinations différentes : Aida pour Salrivage, moi à un navire qui accosterait à sa périphérie, là où, sur son anatomie cartographiée, le relief semblait un peu plus évidé qu’en début de journée… Je lançai à Kadec une proposition. Un nouveau défi. Puisque, de toute évidence, celui-là avait été trop facile, avait-il confié dans toute sa superbe. Je lui confiai un présent que je n’avais réservé ni à mon mari, ni à mon fils, ni à aucun amant, ami ou parent : mes escales prévues. Quelque chose de plus intime pour moi que la radicale nudité : un aperçu même fugace par delà le masque toujours changeant. Un élan du coeur, une mauvaise décision, aurait-il pensé, guidée par un élan subit d'émotion?

Samarach, dans un mois tout au plus. Bellac, dans deux ans. Valcoeur, dans trois. Et après, l’infini de la mer : je viendrais jouer sur son échiquier. Je lui dis qu’à chaque point d’ancrage, je saurais l’y faire gagner : je ne dis pas en quoi, cela nous laissait la marge qu’il nous fallait. Lui, pour quérir ses victoires. Moi, pour les lui trouver.
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